Vélo et écologie

Se déplacer en vélo est-il si écologique que ça ?

Notre équipe scientifique, doutant parfois de thèses un peu trop rapidement affirmées, s’est penchée sur ce problème. Quelle énergie un cycliste doit-il fournir pour effectuer un parcours ? Quel est l’équivalent carbone de ce déplacement en vélo ? Voici toutes les réponses et quelques surprises également.
Cofidis J P Vélo et écologie
Jean-Pierre en plein effort !

Vous faites du vélo ? Tant mieux ! On va pouvoir se comprendre. Prends cette route, m’a-t-on dit souvent, pas de problème, elle est plate. Plate ? Elle monte ! Et pas la peine de faire demi-tour, insidieusement la chaussée bascule et s’élève dans l’autre sens ! Même chose avec le vent, toujours de face, quelque soit la direction que vous preniez. Même quand un vent à décorner les bœufs se met à souffler ! Alors, pédalant comme un forcené contre les éléments, vous songez au doux moment que vous allez vivre, tempête dans le dos, pour le retour - l’avantage d’avoir le dos large - sans presque pédaler. Vous gambergez sur la largeur que représentent vos épaules. Un vrai spinnaker qui va vous propulser à des vitesses supersoniques. Que nenni ! Le vent fait demi-tour avec vous rien que pour vous emm…
Dans ces conditions, pourquoi se déplacer en vélo ? C’est tellement dur, le vélo. Parce que le vélo, c’est bon pour ta santé répondent en cœur les médecins, les cardiologues et tous les gens qui vous veulent du bien. Et c’est écolo ! Écolo ? OK. Mais moi j’aime bien vérifier. Évaluons donc l’empreinte carbone laissée par un cycliste vraiment très lambda, moi en l’occurrence, qui réalise un parcours sur le plat - imaginons du vrai plat,  sans vent, pure vue de l’esprit - un parcours disais-je de 50 km à une vitesse moyenne de 25 km/h. Si je calcule bien : deux heures de route. Je vous fais grâce des équations fastidieuses prenant en considération les frottements, mon aérodynamique – pas terrible, je vous le concède – ma masse graisseuse - trop importante - la forme de mon nez profilé, de mes oreilles aérofreins ainsi que du fait que je me sois rasé les jambes le matin même. Il me faut développer une puissance moyenne de 145 watts pour faire mes cinquante bornes. Rien que ça ! En deux heures, j’effectue un travail demandant 0,29 kW/h ou 2100 calories en tenant compte du fait que mon rendement énergétique (0,125) n’est plus au top. J’ai donc le choix de me brancher sur une prise électrique pour me charger de 0,29 kW/h ou de manger une entrecôte d’environ 800 g. J’opte pour la deuxième solution par goût immodéré de la viande de bœuf, mais sous l’œil réprobateur et unanime d’Anne.
Mais, flûte et zut, mon merveilleux steak de 800 g est d’origine argentine ! Voilà 9 kg de CO2 pour le faire venir par avion, rejetés dans la nature tout cela pour que je puisse effectuer, contre le vent et en perpétuelle montée, mes 50 km. Je produis donc 180 g de CO2 par kilomètre réalisé. Comme quoi, je ne me mouche pas du pied ! Je joue avec les Porsche Panamera V8 biturbo ! En quelque sorte, je suis une grosse cylindrée ! (roulement de mécanique) Inconvénient majeur : je suis passible, avec mon vélo, du paiement d’un malus écologique de 9050 €. Ça calme !
Mais alors combien faut-il de bêtes pour nourrir 197 coureurs du Tour de France pesant chacun 65 kg –  ils sont nettement plus secs que moi - parcourant en 21 jours 3540 km à la vitesse hallucinante de 41 km/h avec une pente positive moyenne de 7 % ? Super le problème ! (Heureusement, y’ a Internet !) La puissance moyenne développée est de 356 W. Ce qui en 86h20’ de vélo représente un travail de 37 206 kW/h ! Un vrai gros compteur Linky. Il faut alimenter ce boulot par 32 kilocalories. D’où, avec un rendement énergétique de sportif accompli, le besoin de déjeuner de 128 kcal. Soit près de 50 kg de viande pour l’ensemble de la grande boucle. Près de dix tonnes de viande pour le peloton. À la réflexion, c’est peut-être ça que la caravane publicitaire transporte. Heureusement, les scientifiques ont pu mettre la viande en petites pilules autrement les coureurs seraient rapidement écœurés.
Je ne vous dis pas l’empreinte carbone avec du bœuf argentin ! Quelque chose comme 107 520 tonnes de CO2 soit plus de 30 kg au kilomètre pour le peloton ou encore 155 g au kilomètre par coureur. Le malus d’un coureur est donc bien meilleur que le mien puisque chaque champion ne sera taxé que de 3 113 € (610 148 € dans les caisses de l’état au passage ; Vas-y Président !)
Tout ceci n’est véritablement pas raisonnable. Nous ne pouvons pas indéfiniment continuer à polluer la planète et à la dégrader. Alors non seulement j’arrête le vélo pour sauver notre magnifique terre, mais je lance sur Internet une pétition pour interdire le Tour de France.
P.S. On me demande pourquoi manger du bœuf argentin au lieu de bonnes bêtes françaises ? Parce que c’est la viande de mes burgers et qu’elle se marie mieux au délicieux goût du ketchup !